Le colonialisme nous encercle.
- La mer en face de nous et ses contrées sont hostiles à notre identité. La Méditerranée n’est envisagée que sous l’influence latino-vaticane ou sionistes.
- Derrière nous, la région subsaharienne est remplie de sa présence militaire.
- A côté de nous, la Libye est disloquée.
- A l’intérieur, nous ne produisons ni pain, ni vêtements, ni médicaments, ni armes, ni argent, ni élites, ni idées. Aux traditionnelles vassalisations face à l’Empire, nous avons permis à ces vassaux étrangers d’être présents dans les calculs politiciens qui pèseront le moment venu sur les choix politiques, sociaux, économiques et idéologiques.
- Il a corrompu tous les corps constitués, tous les corps intermédiaires, tous les partis politiques et presque toute la société civile.
- Il a sapé l’école, la Mosquée et la culture.
- Il s’est approprié les ressources du sous-sol.
- Il a imposé l’exclusion du peuple et la persécution de ses élites.
- Il a imposé des accords économiques, financiers et militaires au détriment des populations algériennes.
- Sur le plan symbolique, il a réussi à saper la langue nationale, la personnalité algérienne, l’image du FLN historique, l’image de l’ALN. Il a pris sa revanche.
- Il a transformé l’Algérie en comptoir commercial, maintenant il nous pousse à devenir un comptoir colonial achevé puis une immense base militaire comme auxiliaire de ses armées.
- Ses auxiliaires nationaux illégitimes ont fini par détruire le peu de légalité et sapé le peu d’État. Maintenant ils risquent de nous pousser au suicide ou à la guerre civile lorsque l’appel à l’intervention étrangère restera sans suite.
- Il leur propose en guise de remplacement la polyarchie, c’est-à-dire le gouvernement du technocratisme, du démocratisme, de l’islamisme confrérique, de l’humanisme sioniste et de l’affairisme.
La réponse à tous ces périls : les Algériens conscients, organisés et combatifs.
Il faut maintenir la pression sur ce système pour l’obliger à reculer et à partir. Les manifestations pacifiques sont efficaces, mais insuffisantes. Le peuple doit s’organiser plus efficacement et d’une manière plus opérationnelle pour se prendre en charge et faire émerger :
- Un cadre démocratique et populaire
- Une pépinière pour l’encadrement de demain en devenant acteurs politiques
- Un programme de rupture et de changement.
Le peuple doit donc débattre de l’avenir de l’Algérie. Ne tombez pas dans le piège des seules manifestations qui risquent de devenir inefficaces ou de se transformer en violence incontrôlable. La grande force est la mobilisation générale pour produire des idées, des élites et se préparer à remplacer ce régime qui va imploser ou tomber ; car il a épuisé ses ressources organiques et humaines. L’État de la rente et de la Hogra est bien-vacant ouvert à tous les aventuriers. Ne reproduisons pas mars 1962, juin 1965 et janvier 1992.
Il est trop tôt pour parler de Constituante. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Ne nous engageons pas hâtivement sur ce qui engage l’avenir de tous les Algériens et qui relève des sensibilités identitaires. Chaque chose en son temps, avec ordre et méthode. Les ennemis de l’identité algérienne, les partisans du monopole et de l’exclusion, à proximité des agents de la subversion, sont actifs en infiltrant les réseaux sociaux de la société civile. Donc pas d’improvisation ou de précipitation.
Devant la déliquescence des appareils d’État et de la corruption dans la vie politique, sociale et économique, les cadres et les intellectuels intègres et nationalistes doivent donner le temps et les moyens à la jeunesse algérienne, dans sa diversité, pour qu’elle édifie les noyaux de la vie politique, libérée de la peur, de la répression et des pratiques d’infantilisation, de caporalisation et de rente.
Ce ne sont pas des clients ou des relais de soutien que nous voulons impulser, mais c’est un peuple que nous voulons remettre en marche pour qu’il exerce ses responsabilités historiques et qu’il accède au rang de populaire qui sied à la grandeur de l’Algérie et à sa position géopolitique. L’exigence de réalisme sur la situation objective et l’impératif de devoirs envers le peuple algérien nous montrent l’erreur à ne pas commettre : tenter de remplacer une inertie héritée par des appareils reproduisant les mêmes structures mentales et les mêmes infantilismes qui ne revendiquent que des droits. La rupture véritable, c’est faire émerger des entités politiques structurantes et dynamiques comme de véritables communautés Populaires, c’est-à-dire des adhésions libres fondées sur :
- Le devoir de servir l’intérêt national
- La liberté et le droit à la différence culturelle, idéologique et organique
- Le respect du pluralisme politique
- L’autonomie par rapport à l’argent privé
- L’autonomie par rapport aux organes de sécurité
- Le refus d’instrumentaliser la religion, la langue et la culture à des fins politiciennes
L’acte de résistance contre l’ingérence étrangère, contre la perte de souveraineté nationale, contre la dislocation géographique et mentale de la Nation devraient être l’inspiration dont les Assemblées Populaires seraient l’émanation. L’édification nationale et l’indépendance économique sont aussi l’inspiration dont les Assemblées Populaires seraient l’émanation. La défense et la promotion de l’Algérianité sont aussi l’inspiration dont les Assemblées Populaires seraient l’émanation.
Les Forces armées et les Forces sécuritaires doivent saisir la chance historique de se réhabiliter et d’entrer la tête haute dans l’histoire qui est en train de s’écrire comme en 1954 :
- Ne pas réprimer, ni menacer, ni intimider les Algériens en train de s’organiser pacifiquement et de débattre dans les lieux privés ou publics.
- Le mieux serait de donner toutes les garanties légales et tous les moyens d’organisation pour que les Assemblées Populaires s’érigent en véritables forces politiques démocratiques. En effet, il est difficile d’imaginer sur le plan du réel des Assemblées Populaires ayant toute la latitude de se constituer et de travailler librement alors que la société est toujours sous l’emprise de la méfiance et de la défiance du tout sécuritaire, la dramatisation du terrorisme résiduel, la gestion des pénuries, la perte de confiance en soi. Dans une société telle que la nôtre, mise dans la situation d’être en panne d’idées politiques et de projets d’édification, mais en grande ébullition sociale et en grande soif de liberté, il faut éclairer le chemin de l’avenir pour que notre jeunesse s’y engage avec détermination et invente ses propres modes de militance, d’organisation.
- Laissez les Assemblées Populaires pousser et grandir comme de véritables pépinières dont émergeront les grands partis politiques, les grands syndicats et les grandes figures de la société civile qui prendront en charge les Institutions, la culture, la politique, l’économique. Les grands commis de l’État ne sont pas les Énarques et les technocrates, mais ceux qui s’engagent à faire de la politique, c’est-à-dire à œuvrer pour le bien des Algériens et la souveraineté de l’Algérie.
Sans tutelle bureaucratique et sans emprise politicienne, les Algériens, tous les Algériens, devraient pouvoir mettre en œuvre rapidement et efficacement :
- Des comités populaires à vocation politique
- Des comités populaires à vocation syndicale
- Des comités populaires à vocation sociale
- Des universités populaires où s’organisent des débats populaires, des conférences, des échanges d’idées, des plateformes de projets.
- Des radios, des sites web, et des télévisions publiques comme espace de liberté et de débat. Les nouvelles technologies offrent des moyens gratuits ou peu couteux pour exercer la vocation d’information et de communication indissociables de l’acte militant et de l’acte pédagogique sur le plan idéologique et politique.
- Sans tarder, le scoutisme devrait reprendre ses activités et son éducation à la vie civique.
Il ne s’agit moins de cadres organiques, pouvant devenir creux et rentiers, mais l’ambiance de rupture et de changement. Cette ambiance doit devenir rapidement, par le dynamisme, la prise de risque et la créativité, un fait culturel propice à créer une synergie sociale et une efficacité sociale soutenant le changement des mentalités et des pratiques.
Les Assemblées Populaires doivent vivre dans cette ambiance créative et libertarienne et participer à la création du nouvel environnement de l’Algérien. C’est l’acte populaire et politique par excellence. La politique est un cadre organique pour donner suite à ses idées et les mettre en compétition avec d’autres idées. Il faut que ce cadre baigne dans une ambiance (une culture) favorable à la créativité et à l’épanouissement personnel pour qu’il puisse porter ses fruits et ne pas refaire les erreurs du passé en instaurant des carcans bureaucratiques et rentiers.
Ce sont les Assemblées Populaires locales, régionales et nationales qui vont avoir les implications les plus responsables et les plus approfondies, donc les plus viables et les mieux faisables, sur la Constituante qui va modeler sans passion ni confusion, sans peur ni anarchie, le devenir institutionnel et doctrinal de l’État de droit, de la Démocratie, de la République, de l’Armée, de la Justice.
Lorsque tous les Algériens participent librement au renouveau politique et populaire alors le pluralisme politique peut être une force de progrès et de souveraineté. Il sera surtout une adhésion libre et responsable où on peut débattre non seulement de l’économique, du social, de l’idéologie avec responsabilité et compétence, mais on peut débattre des questions sensibles de la personnalité algérienne comme l’Islamité, l’Arabité et la Berbérité sans heurter les sensibilités, sans provoquer les faux clivages, sans se focaliser sur les différences et oublier le dénominateur commun qui unit tous les Algériens : militer pour la rupture et le changement, agir pour qu’il n’y ait plus d’oppresseurs et d’opprimés, faire confiance à la Justice et se soumettre à ses décisions justes, transparentes et équitables.
En 1989, suite aux émeutes d’octobre 88, nous avons inversé les mécanismes et confondu les priorités. En mettant en place uniquement des appareils, des illusions démocratiques et un appétit pour le pouvoir, nous avons facilité la rente, l’opportunisme, l’aventurisme et le maintien du monopole et de l’exclusion. Les partis et les courants d’idées organisées dans la clandestinité et déjà infiltrés par les auxiliaires de la subversion interne ou externe ne pouvaient que donner existence à des corps politiques et médiatiques infantiles ou irresponsables. Nous devons mettre fin à l’effusion du sang, à l’incompétence et au volontarisme aveugle ou arbitraire.
Lorsque nous parlons d’Assemblées Populaires, nous annonçons la rupture non seulement avec un système en déficit voire en déni de représentativité populaire, mais avec les pratiques et les théories traditionnelles héritées du colonialisme qui nous font voir ce peuple comme une abstraction dont il faudrait parler de lui et à sa place alors qu’il est incarné vivant en sa qualité d’être ontologique et social et qu’il est un déploiement humain à travers les activités qu’il exerce dans son territoire de vie. Il ne s’agit donc pas de remettre en place un système éculé de représentativité populaire délégué, mais d’exercice effectif de la responsabilité populaire dans la vie politique, juridique, culturelle et économique. Même s’il délègue une partie de ses prérogatives à des mandatés par le truchement des élections démocratiques, le peuple devrait garder l’initiative politique ainsi que le contrôle sur ses élus et leurs lois. Cette démocratie demande donc à être rodée avant d’être formalisée dans une Constitution ou dans une Assemblée nationale.
La Constitution comme Loi suprême élaborée par une Constituante (Assemblée) doit se faire pour une seconde République. Soit elle se fait dans un cadre révolutionnaire et les membres constituants seront légitimes et légaux par la légitimité de l’acte révolutionnaire qui cesse de fait et de droit lorsque la vie « normale » reprend son cours. Il faut alors refaire une nouvelle Constitution avec tous les problèmes de légitimation et de représentativité, car l’expérience a montré que l’acte révolutionnaire est souvent remis en cause. Soit elle se fait dans un cadre évolutionnaire, c’est à dire une maturation idéologique et politique. Je suis d’avis, sans être juriste, que l’occasion qui s’offre à nous est de créer les conditions morales, sociales et politiques de la maturation par l’apprentissage démocratique. Si le régime tombe ou s’il persiste dans son égarement, il faut oser apprendre la démocratie et laisser le sentiment démocratique (refuser la tyrannie) devenir une culture acquise et une praxis sociale.
Il faut du temps pour capitaliser l’expérience démocratique en la pratiquant et en la conceptualisant par ce qu’on appelle le retour d’expériences ou la théorisation des activités. En attendant que l’expérience devienne praxis sociale (théorie et pratique), un gouvernement de transition, sous la supervision de « Sages » et avec l’ancienne Constitution expurgée du « Makhzen marocain », peut administrer l’Algérie et faire face aux menaces extérieures. Cette période devrait être la plus courte, car on ne peut engager des réformes profondes et radicales qu’avec une Constitution et une Assemblée nationale représentative. Cette représentativité ne peut être bâclée ou immature. Il s’agira alors avec des gens conscients, compétentes et représentatifs de se pencher sur les problèmes de fond : l’exercice du pouvoir, la personnalité juridique, la séparation des pouvoirs, la souveraineté populaire etc. Les référents actuels comme l’Arabe, le Berbère, l’Islam doivent être abordés non plus comme une rente ou une manipulation, mais comme un problème de civilisation avec les réponses adaptées et partagées par la majorité :
- L’islam est-il le Dine d’Allah et la religion des Algériens ou la religion d’État ?
- Le Berbère (l’Arabe) est-il un contenu culturel, ethnique, historique ?
- Quelle langue ?
- Et d’autres questions que le colonialisme et le despotisme nous ont légué
Aujourd’hui nous sommes sous l’ivresse des foules délirantes assoiffées de changement et de liberté, demain nous serons dans l’obligation de répondre scientifiquement à ce qui fait un peuple, une nation. Nous n’avons plus le droit à l’erreur, au sectarisme et à l’esprit partisan.
Nous ne devons avoir aucun préjugé sans expérimentation et sans exploration de toutes les possibilités. Nous devons faire confiance à notre peuple et le cas échéant lui apporter l’expertise technique sur le plan du droit. C’est le peuple algérien qui doit être aux commandes et c’est à lui de fixer le cap et la vitesse, les experts ne sont que des outils de navigation comme une boussole, une vigie, une voile. Un diplôme, un rang politique, une expérience ne sont rien s’ils sont vidés de l’utilité sociale qui leur donne un sens et une finalité.
Les Assemblées Populaires sont aussi une mesure prophylactique à la fois contre les contradictions politiques et idéologiques profondes de l’Algérie qui risquent de se manifester de nouveau, et contre le mouvement chaotique du monde qui ne fait qu’empirer. C’est de notre devoir de jalonner la voie et de prendre toutes les précautions pour que le désordre et le passé ne se répandent pas sur la jeunesse algérienne et la font dévier de sa trajectoire.
L’école et l’université algérienne ont été incapables de concevoir un enseignement de qualité par des ateliers pédagogiques, des techniques modernes de recherche et d’expérimentation, des libertés de choix, des stratégies d’apprentissage individualisées. Faisons donc de l’exercice de la démocratie une école qui va faire émerger un modèle conforme à notre espace géographique, à notre mentalité et à notre désir d’être libre et responsable.
Nous mettons en défi les idéologues, importateurs d’idées clés en main, de réaliser sans les Algériens un projet démocratique et républicain viable. Les Algériens connaissent leur terrain sociologique, leurs contradictions sociales, leur ambition politique, leur foi, leurs réseaux de solidarité, leurs désirs de fédération et de résistance, leurs problèmes concrets. Il faut leur donner l’opportunité et la pertinence d’agir.
Cela demande du temps et de la patience. Il faut les avoir et savoir les accélérer et les potentialiser. Nous avons perdu 60 ans de notre indépendance par le manque de liberté et d’innovation.
L’ingénierie de rupture et de changement est une technologie intellectuelle, ce n’est pas une machine importée ou un produit acquis au marché noir. Les Algériens disposent de compétences silencieuses ou marginalisées aptes à engager les véritables réformes qui construisent l’État de droit dans le cadre d’un projet civilisationnel et non dans le cadre d’une technocratie. L’ingénierie consiste à laisser les gens libres de s’identifier, de s’associer, de se mobiliser et de travailler. Ce n’est pas une affaire de moyens, mais de volonté et de liberté. La liberté s’arrache.
Il faut rompre avec les microcosmes et les tours d’ivoires qui croient que la réforme et le changement se jouent sur un registre autre que la mentalité collective et la géographie de vie sociale. La Révolution algérienne a dévié de ses principes et de sa trajectoire lorsque le peuple algérien a été remisé dans les oubliettes et les appareils confisqués par les rentiers, les mégalomanes et les amuseurs publics.
Le trousseau de clés pour la réussite et l’efficacité non seulement des Assemblées Populaires, mais de toute entreprise à caractère populaire comme par exemple les coopératives de métiers et de service est :
- La liberté avec son corollaire la responsabilité
- L’exercice plein des responsabilités qui donne un sens pratique à la liberté
- Le Savoir par lequel non seulement on connait son devoir, ainsi que l’étendue et les limites de sa liberté. C’est le savoir qui va ouvrir les possibilités d’action et donner à la liberté et aux responsabilités davantage de perspectives, d’efficacité et d’expression en élargissant les champs d’exploration et d’expérimentation en termes d’idées et d’activités
- La légitimité, c’est-à-dire la reconnaissance sociale de la compétence. La compétence étant la capacité d’agir et le potentiel de savoirs reconnus par ses pairs à travers de ce qu’on appelle les règles de l’art et la déontologie.
- La démocratie à la fois comme sentiment démocratique qui refuse la Hogra et le passe-droit, et comme pratique démocratique qui donne à chaque participant une voix égale à celle d’un autre, qui prend les décisions par la concertation, la consultation et le vote transparent.
- La constitution d’une entité sociale par assemblée générale dont les membres sont liés par libre adhésion et par contrat. L’Assemblée est avant tout un Corps délibérant et fonctionnant démocratiquement selon des règles transparentes et admises par tous.
C’est dans cette ambiance culturelle, sociale, politique, qui prend ses droits pour exercer son devoir et agir selon sa conscience, le populaire peut jouir pleinement de sa cité, manifester sa solidarité. La République est l’État constitué par ce désir collectif de droits et de devoirs. L’État est la garantie républicaine qui permet à chacun d’accomplir son devoir dans les meilleures conditions et de réclamer ses droits dans la meilleure justice. Le devoir n’est pas seulement d’ordre corporatiste ou légal en exécutant des tâches règlementées, mais la compétence et la conscience de chercher le bien de tous avant le sien propre, de défendre le bien public avant le bien privé. Le devoir signifie aussi la proximité sociale avec le peuple pour partager ses souffrances, porter ses désirs et puis être porté par ce peuple qui exprimerait ainsi sa gratitude et sa reconnaissance à ceux qui sont sorti de ses rangs, qui l’ont servi et défendu.
Cette voie est celle de la construction d’un État et de ses institutions en partant de la base populaire vers le sommet du pouvoir politique, législative. L’Élite noble et généreuse qui nous manque doit s’édifier par ce processus loin des arrangements d’appareils et de la rente.
A tous les échelons territoriaux et à tous les niveaux de responsabilité, l’Assemblée Populaire a des principes sacrés (inviolables) :
- Constituante lors de sa création par la libre adhésion et la mise en commun des moyens, des motifs et des buts.
- Traitement des affaires publiques touchant la vie locale, régionale ou nationale
- Élection des membres de direction.
- Rendre compte à ses membres.
- Consultative et participative lors de son fonctionnement.
- Souveraine dans ses décisions
Encore une fois, j’invite les Algériens à adopter les Assemblées Populaires en accentuant les caractères de résistance nationale, de libération nationale, de transition démocratique, d’Islam civilisateur. Sur le plan de notre identité, il faut qu’elle soit un tenseur de forces et d’élan et non un carcan organique. La meilleure façon d’échouer est de mettre en place l’appareil politique avec les risques suivants :
- Infiltration et manipulation
- Lutte des égos pour la direction
- Perte de temps dans les formalismes
- Relégation au second plan de l’essentiel : le débat d’idées
Ce processus populaire n’est pas inédit et n’est pas une marque déposée : il est l’expression des traditions arabo-berbères et musulmanes qui ont permis à l’Algérie de vivre, malgré la décadence musulmane et l’intrusion du colonialisme dans l’espace musulman, en solidarité, en partage de nourriture et en concertation sociale et politique dans un mode social et politique le plus proche de la démocratie naturelle et le plus en harmonie avec la nature primordiale de l’humain qu’avec les polyarchies des oligarques et des Énarques occidentaux. Les Algériens ont des milliers d’exemples d’assemblées populaires de résistance contre le colonialisme et l’appauvrissement du peuple algérien. De l’Est à l’Ouest, du Nord au Sud, la pratique sociale, politique et militaire des Résistants algériens s’est appuyée sur les Assemblées Populaires (Djamaâ ou Mejless choura) pour restaurer l’État algérien et l’organisation du territoire.
Après l’indépendance, l’Autogestion et l’Université populaire ont été la reproduction des assemblées populaires qui ont soutenu la révolution algérienne. Il est vrai que le mouvement communiste algérien a été à l’avant-garde de ce processus, mais ce processus, en dehors de l’appropriation légitime idéologique et de l’encadrement partisan et efficace, demeure un mouvement spontané issu de nos entrailles culturelles.
Le système post indépendance a détruit l’activité politique et a corrompu et brisé l’esprit de ces Assemblées afin de saper l’idée même de se concerter ou de débattre par laquelle il ne peut y avoir de tyrans ou de totems. En 1992, il a manipulé les « Majless as Chouyouks » populistes importés d’un autre siècle et les « États-majors républicains » élitistes importés de le Révolution jacobine pour nous imposer la terreur et livrer l’Algérie aux prédateurs économiques. Toutes les représentativités populaires ont été des caisses de résonance du pouvoir illégitime. Nous avons épuisé toutes les solutions crapuleuses, il nous reste à revenir à nos origines et reconquérir notre avenir en toute indépendance.
Notre patrie est déchirée, corrompue, atomisée et anesthésiée, elle n’a pas besoin d’appareils, mais de germination à nouveau de cette idée populaire fédérative dans le social et le politique. Les Algériens pratiquent depuis octobre 88, mais en cercle restreint et sous forme larvée, la mutualisation des moyens et de l’argent pour disposer du crédit à l’investissement ou à la consommation. Il faut que ces expériences de résistance se capitalisent dans un programme global d’édification nationale et de résistance contre l’occupation étrangère qui nous guette. Chacun, dans son quartier, dans son douar, dans son lieu de savoir, de travail ou d’oisiveté comme le café ou la rue, devrait se mettre dans un processus de moléculaire : l’efficacité politique est tributaire de l’efficacité sociale et de l’ambiance culturelle.
Nous devons insister sur la signification de la mutualisation dans la conjoncture nationale et internationale :
La mutualisation ne consiste pas seulement à regrouper les moyens financiers, humains, organisationnels, informationnels et logistiques pour optimiser l’efficacité d’une procédure, d’une action ou d’un projet. Elle consiste surtout à mettre en synergie les savoirs et savoir-faire pour produire de nouveaux savoirs et de nouvelles méthodes plus performantes et plus décisives. C’est échanger et partager ce qui était vu d’une manière parcellaire et isolé pour le mettre ensemble et induire de nouveaux comportements, de nouvelles idées, de nouveaux horizons.
Il ne s’agit pas de faire émerger des leaders pour les faire exposer aux pressions et à la corruption. A ce sujet nous voyons fleurir les anciennes figures du régime et les revanchards se repositionner en faisant des offres de services alors que ces mêmes figures n’ont produit ni pensée politique, ni pris des initiatives historiques sauf attendre ….
La mutualisation dans la post modernité c’est la coordination démocratique et le débat d’idées sans centre ni autorité suprême. Il faut produire des idées, des analyses, des projets et rompre avec l’ancien système en laissant les choses prendre leur maturité jusqu’à atteindre le régime de croisière et à ce moment mettre le cap sur la prise du pouvoir. Il faut juste observer et adapter à nos conditions l’expérience des « Gilets jaunes » que chacun veut récupérer en vain. Le système français tente pas tous les moyens y compris ceux des répressions de les endiguer vers des appareils et des procédures anciennes pour « négocier » des rentes, des places dans le système actuel sans changement à l’ordre des choses.
Tous les caciques du système, tous les alliés extérieurs et tous les infantilismes seront sapés, car ils ne sont pas capables de produire des idées ou d’imaginer le changement : ils sont le produit de la pensée unique, de la rente et de l’immobilisme. Plus vite et plus intense la mutualisation sera mise en place et déployée plus tôt et plus surement nous serons débarrassés des vermines et des miteux.
L’ennemi de la mutualisation est de deux sortes. Le professionnel de la dénonciation et de la protestation qui ne propose ni idées ni méthode. Il joue sur l’affectif, la fascination et la perte de temps. La rivalité mimétique, c’est-à-dire l’affrontement des égos au lieu de la confrontation des idées. Les réseaux sociaux favorisent ces deux ennemis et les amplifient par le primat de l’instant t fugace qui ne fait que consommer et s’enivrer au détriment de la capitalisation et de la réflexion qui demandent du temps et de l’effort.
Le volontarisme dans la politique, l’économique, l’industrie, l’agriculture et le culturel a montré ses limites. Il ne faut jamais agir en dehors du peuple ni parler au nom du peuple. Le peuple est une abstraction des Révolutions françaises et bolcheviques qu’on mobilise dans un cadre partisan ou dans un cadre militaire. Les algériens doivent refuser l’abstraction et se réincarner en tant qu’individus physiques porteurs de projets à conjuguer avec d’autres porteurs de projets. Ceux qui n’ont ni idée, ni argent, ni projet apportent davantage : l’espoir, l’encouragement et la présence.
Le porteur de projet travaille comme l’industriel et l’entrepreneur : commencer par la base et remonter au sommet, commencer par les gros œuvres, puis le second œuvre et enfin la décoration. Si on se trompe d’étapes, de méthodes et d’hommes, nous aurions une fois de plus perdu du temps et dilapidé les énergies.
Cette solution des Assemblées peut être transitoire, le temps de faire émerger l’État et donner vie à la vie politique, ou devenir la solution définitive et donner naissance à une forme inédite de gouvernance. Les Algériens sont capables du meilleur, mais laissons le temps et la jeunesse algérienne pour juger de ce qui leur convient le mieux sans préjugés et s’inscrire par la réalité des faits et la véracité des idées dans l’Histoire, la leur.
Les Algériens sont capables de faire des propositions non seulement d’ordre politique et institutionnel pour la vie démocratique et républicaine, mais d’ordre économique et social. Ils peuvent trouver des solutions inédites pour la réorganisation de la sécurité et de la Justice. Laissons-les exercer leur métier d’Algérien. Il est à inventer. Une fois inventé, ce métier sera florissant, faisons confiance et apportons notre soutien.
Cette solution va trouver résistance et négation de la part du système, des partis existant et des partisans des recettes importées. L’histoire est en marche : les partisans du monopole, les appareils du consensus autour du statut quo ne peuvent imposer leurs solutions et marquer la différence. Ils sont épuisés et finis. Les Algériens doivent s’organiser librement en arrachant par le rapport des forces, sur le plan pacifique, mais avec détermination et intelligence. C’est de cette façon que s’imposeront à court et moyen termes les conditions essentielles du développement : les conditions de transparence et de mérite bien posées et respectées.
C’est la seule solution pour préserver l’avenir de la Jeunesse et reconquérir l’indépendance et la souveraineté nationales. Ce n’est pas une partie de plaisir ou une colonie de vacances festive, mais une révolution populaire contre la recolonisation. Il ne s’agit pas d’élections, mais de l’exercice souverain et responsable des Algériens dans la vie sociale, politique, économique, culturelle et informationnelle de leur pays. La démocratie occidentale est agonisante, nous devons la pratiquer différemment. La république occidentale est dévoyée, nous devons l’imaginer différemment.
C’est la seule solution pour élire un Président légitime apte à faire face à la menace tant extérieure de l’impérialisme qu’intérieure des rentiers corrompus. C’est la seule voie pour édifier un État de droit. C’est aux élus et au Président légitime qu’il appartient de configurer les réformes politiques et économiques. Aucune réforme y compris celle des « Réformateurs » n’est viable ou fiable si elle se fait hors du terrain populaire. La Révolution algérienne n’a pas menée par des techniciens ou des experts, mais par des paysans, des sans métiers, des sans grades.
Les milliers de milliards de dollars, la position géostratégique de l’Algérie et la revanche contre la Révolution algérienne ne vont pas accepter la défaite par des déclarations romantiques ou de nobles intentions. Ils vont se battre. Les Algériens doivent livrer bataille en s’organisant. Dénoncer, protester et manifester c’est bien, mais insuffisant.
Les Algériens doivent être sans concession sur l’Armée Nationale Populaire : elle nous appartient à tous, c’est l’héritage de l’ALN, nous devons la protéger. Elle est le rempart contre l’agression de notre territoire et la transgression de nos frontières.
Si les Algériens sont prêts pour relancer le processus des Urnes pour des dates symboliques qu’ils le disent démocratiquement : 05 Juillet 2019 – 1er Novembre 2019 ou plus tard. C’est leur choix que chacun doit respecter. Notre rôle est d’observer avec impartialité, critiquer ce qui est blâmable, ou conseiller lorsque l’on nous sollicite.
Omar Mazri
PS : Le lecteur avisé peut trouver une similitude avec des textes ou des tracts faisant mention des Assemblées nationales. Le texte original a été élaboré avec ma collaboration active et déterminante en 2014 avant les élections du sieur Bouteflika, mais il a été publié à mon insu avec une volonté manifeste d’exclusion. Le lecteur averti peut retrouver mon style et une grande partie de mon lexique. Nous aimons tous l’Algérie et nous voulons la servir, mais nous divergeons sur le cadre idéologique, la manière politique et la finalité sociale.