Les années égrènent les conférences franco-africaines, toujours sur le même tempo. On y rivalise de discours lénifiants qui, à en croire leurs auteurs, dressent le plus beau tableau des États africains et de la coopération avec l’ancienne puissance coloniale. On ne tarit pas d’éloges. L’Afrique et la France sont les dernières régions du globe où règnent la démocratie, l’état de droit, le progrès, le développement et la concorde. Et le Mali y a toujours été cité comme le modèle adulé, le miracle… Incorrigibles, les acteurs de cette utopie iront jusqu’à ignorer le déplorable état où se trouve aujourd’hui le pays d’accueil du prochain sommet Afrique France prévu pour janvier, le Mali. On peut parier qu’en dehors des « miracles » des opérations militaires Serval et Barkhane, aucun de ces illustres participants n’évoquera les graves problèmes qui minent le Mali et encore moins les vraies solutions, de peur de déroger à la tradition. Or, il est des problèmes qui subsistent obstinément, parce qu’aussi vieux que la République du Mali et qui par surcroît s’aggravent d’année en année, faute des solutions : la question touarègue, l’Azawad, le Nord-Mali, au choix des susceptibilités et des sensibilités. Sans compter un demi siècle passé de massacre de civils, de pillages, des milliers de réfugiés et personnes déplacées, des accords inappliqués, et la moitié du territoire national incontrôlée. Au départ il y avait dit-on un « problème touareg » ; aujourd’hui il s’y ajoute un « problème Peulh »; demain à qui le tour ? Sur la question du Nord-Mali sont venus se greffer les trafiquants de drogues, les terroristes, qui irriguent la sous-région d’importants flux monétaires au service des projets les plus criminels. La question a largement franchi les frontières du Mali et gagné les pays voisins qui continuent de faire la sourde oreille. Des armées étrangères viennent fouler allègrement le sol des Etats de la région, dans les pures traditions coloniales, compromettant dangereusement leur souveraineté. Comme à l’accoutumée, les rideaux se refermeront sur la énième messe franco-africaine, sans un mot de l’essentiel pour le Mali.