« Alea jacta est » est une locution latine signifiant « le sort en est jeté », ou « les dés sont jetés » attribué à César franchissant le Rubicon (le fleuve faisant frontière entre la Gaule et Rome) et qui voudrait dire qu’il s’en remettait aux événements hasardeux sur lesquels il n’aurait aucune emprise, et sur l’histoire à advenir, car il n’y a plus de possibilités de revenir sur ce qui a décidé et entrepris. Les gouvernants saoudiens n’ont ni la stature de César ni la grandeur de Rome et de son empire, mais juste de l’argent pour corrompre, une rente religieuse pour fasciner, une arrogance et une sénilité les conduisant fatalement à JASTA – Justice Against Sponsors of Terrorism Act – la loi fédérale américaine votée jeudi 29 septembre 2016 par le Congrès des États-Unis permettant aux cours fédérales américaines de poursuivre des États étrangers qui auraient aidé ou qui aideraient à commettre un acte terroriste contre un intérêt américain. Comme il était hautement prévisible, l’objectif affiché des législateurs américains est de permettre aux proches des victimes des attentats du 11 septembre 2001 de poursuivre en justice l’Arabie saoudite pour son éventuel soutien aux terroristes en cause (15 des 19 terroristes étaient saoudiens) est devenu réalité tangible. Cette réalité vient de se manifester quelques jours après la visite triomphaliste du dauphin saoudien à la Maison Blanche qui a fait croire que sa visite et ses résultats étaient d’importance historique et de portée stratégique. Le cabinet Kreindler & Kreindler vient de demander des dommages et intérêts aux familles des victimes du 9/11 imputant l’attentant aux Saoudiens et aux puissants et vastes réseaux de bienfaisance dont notamment la fondation Al Haramein. Les séniles et les arrogants, sans stratégie et sans profondeur historique civilisationnelle, ont dilapidé leurs ressources, leurs crédits religieux et leur temps en vanités et corruption, mais le temps est impitoyable pour celui qui ne sait où aller sauf suivre la voix de son maître alors que ce maître est devenu lui-même inaudible, confus, empêtré dans ses contradictions et son essoufflement. La fin annoncée des Saoudiens et réalisée par leurs propres mains est en achèvement par la conjugaison de plusieurs facteurs dont les plus importants :
- l’enlisement au Yémen qui devient un gouffre financier pour les Saoudiens, un désastre humanitaire et sans doute un processus qui va les conduire à la cour pénale internationale pour crimes de guerre et génocide si d’ici là les Yéménites ne s’emparent pas d’une ou plusieurs provinces saoudiennes.
- La défaite humiliante en Syrie qui va sans aucun doute d’une manière ou d’une autre leur renvoyer la facture et les groupes terroristes.
- La perte de crédibilité saoudienne face à l’Iran. Les manœuvres sectaires et idéologiques vont s’estomper pour laisser apparaître d’un côté un pays usurpateur de l’Islam et imposteur des lieux saints sans vision réaliste du monde et sans édifice politique, diplomatique, économique et technologique, d’un autre côté un pays habile et édificateur.
- La refondation du Moyen-Orient et la réalisation de l’Eurasie avec l’exclusion des monarchies qui vont de fait se trouver des intrus sans place et sans avenir dans l’environnement géopolitique en émergence qui les cerne déjà militairement, économiquement et politiquement.
- L’Egypte et la Turquie ne sont pas des alliés stratégiques crédibles et durables pouvant aider les Saoudiens, car ils ne cherchent que la manne financière et le prestige religieux de l’Arabie qui sont d’ailleurs en train de s’évaporer pour ne laisser que les déceptions et les illusions perdues des peuples en souffrance ou en insouciance.
- L’Arabie est en crise sociale et financière du fait de son financement de la guerre en Syrie (5 milliards de dollars), de la guerre au Yémen (20 à 30 milliards de dollars), de la course à l’armement (100 milliards). Cette course vaine et hémorragique a fait dire à un général américain qu’il trouvait stupide qu’un de leurs alliés dépense des centaines de millions de dollars (tirs de missiles Patriots) contre des quadricoptères de quelques centaines de dollars (drones yéménites) signifiant par-là l’absence de stratégie, de compétence et de bravoure des va-t-en-guerre. Cette crise en accroissement exponentiel : perte de confiance des troupes et prix du pétrole en chute pour des décennies qui annoncent des énergies renouvelables et concurrentielles. La rente ou plutôt les rentes financières, historiques et religieuses ont formaté les esprits et institué une institution de médiocres serviles à tous les niveaux et dans tous les domaines.
Les Etats-Unis n’ont plus besoin des hydrocarbures saoudiens ni de leur sol, car après l’expansion vient inéluctablement le temps de l’autarcie et de l’effondrement comme ce fut pour tous les empires passés.
- Les Etats-Unis sont en déclin, ils ne peuvent être « garantie » ou « asile » pour leurs protégés, ils ont besoin de vassaux disciplinés et forts. S’ils ne rentrent pas en guerre civile, ils vont se déchirer intérieurement et déchirer leurs alliés. Avec ou sans Trump, les Administrateurs cyniques et cupides de l’Amérique vont saigner à blanc les monarchies en leur faisant payer à prix fort leur sécurité tout en les engageant dans des guerres inutiles et perdues d’avance.
- L‘Islamophobie continue de jouer ses cartes : frapper le musulman par le musulman pour les faire apparaître tous hideux et ne méritant ni pitié ni considération. N’inspirant ni compassion ni respect, leurs territoires peuvent être livrés à la cupidité vorace ou à la destruction totale les laissant sans ressources, sans perspectives de développement, sans projet de civilisation, sans force de résistance, sans continuité et cohérence dans les géographies, les mentalités, les devenirs et les économies. La Turquie, gouverné par un « illuminé » est en train de sombrer, malgré ses cadres militaires, politiques et économiques de haut niveau. L’Arabie saoudite ne va pas sombrer, elle va se volatiliser au milieu des morts, des appauvris, des imbéciles et des déçus qu’elle a semé dans le monde musulman. Le reste du monde musulman qui aura suivi sa voie sera relégué à un comptoir commercial, une base militaire, une zone de transit démographique pour l’Europe, ou un terrain d’affrontement
Les Saoudiens ne se rendent pas compte de l’imminence et de la gravité du danger qui pèse sur eux : 800 personnes parmi les proches des victimes du 11 septembre viennent de déposer une plainte auprès du tribunal fédéral de Manhattan (New York) contre l’Arabie Saoudite pour son financement d’Al-Qaïda et réclamer en dommages et intérêts une compensation financière qui va s’élever non à quelques millions de dollars, mais probablement à des centaines voire des milliers de milliards de dollars. Les Saoudiens et la médiocratie dans le monde arabe et musulman s’imaginent que les dizaines de sociétéd arabo américaines et l’alliance avec Trump contre l’Iran vont garantir un avenir radieux et une pérennité aux médiocres. Trump lui-même a des problèmes avec les institutions de son pays, la démocratie occidentale, malgré ses défauts et ses lobbies, ne permet de réaliser n’importe quel deal avec la justice. Dans le cas présent, il ne s’agit pas de la justice d’un pays du quart monde ou d’un dictateur, mais celle de l’Empire et de ses sujets avec ses règles, son éthique et sa transparence « relative ». Dans cette affaire il s’agit du pactole de Crésus tant pour les parents de victimes et de la ville de New-York que des géants américains du barreau qui ne perçoivent pas des honoraires, mais des pourcentages qui annoncent des sommes faramineuses. La vente bradée d’Aramco (société américaine saoudienne), les revenus du « tourisme de la dévotion » et la mise en hypothèque du sol saoudien ne suffiront ni à se prémunir contre les accusations du FBI ni à honorer les dommages et intérêts que la Justice viendra à exiger dans un avenir proche en réponse à la plaidoirie de Jim Kreindler. Le Fisc américain en prélevant sa part du butin, donnerait à Trump ou à un autre locataire de la Maison Blanche les moyens de financement public pour le sauvetage de l’Amérique. Qui sème le vent récolte la tempête, alea JASTA est : le cabinet Kreindler & Kreindler va franchir le Rubicon et mettre en faillite les Saoudiens. Il s’agit d’un groupe d’avocat fondé en 1950 et dirigé par Jim Kreindler l’expert mondial dans les affaires d’accident d’avion qui gagne pratiquement tous ses procès. Il avait représenté les familles qui ont poursuivi la Libye, dans l’affaire du vol Pan Am 103 de la Pan American Airlines explosé au-dessus de Lockerbie en Ecosse sur son chemin à New York en 1988. Il avait fait casquer la compagnie aérienne pour « faute intentionnelle ». Alea JASTA est, 80 années de servilité fondée sur protection contre pétrole, islamique wahhabite contre indépendance politique et économique des Arabes et des Musulmans vont être renvoyées à l’oubli. Arbi Arbi wa law kana al coulounel Bendaoud. Ce qu’on appelle l’Etat profond américain (deep state) n’est pas al coulounel qui a servi la grandeur de la France dans les colonies, mais une mentalité, une idéologie, une vision globale et stratégique qui peut pousser Trump à l’inertie défaitiste lorsqu’il voit le principal allié de l’Amérique contre l’Iran, le Hezbollah et les Russes se faire massacrer par les médias et les juges américains. L’Etat profond peut aussi se servir de la période de confusion et d’incertitude aux USA pour se débarrasser d’un allié arabe devenu encombrant et inefficace tout en apportant bénéfice financier à l’Amérique et aux affaires par la mise en banqueroute d’un Etat aussi riche que l’Arabie saoudite. Il est fort probable que le deep state ait admis l’idée du retrait de l’Amérique du Moyen-Orient et qu’il mette la pression sur l’Arabie saoudite pour qu’elle renforce son alliance puis sa vassalité à l’Etat sioniste qui aurait pour charge d’assurer la sécurité des monarchies qui déclarent la guerre aux mouvements de résistance ou qui accomplissent une guerre par procuration contre l’Iran. Nous sommes dans une époque de spectacles et de narratives, la réalité et la vérité sont difficiles à entrevoir. Il faut oser voir toutes les possibilités. En effet les dés sont jetés et rien n’est sous la maîtrise des hommes, l’histoire est en train de s’accomplir d’une manière accélérée défiant les logiques de systèmes et d’appareils, c’est ce que j’avais qualifié de mystique de l’histoire dans mon livre sur les révolutions arabes « mystique ou mystification » :
{Nous les emmenons par gradation (vers leur fin) de par où ils n’ont aucun ressenti} Coran
Enfermé dans nos débats sur le « halal » et le « haram » nous n’avons ni le temps ni l’envie de nous préoccuper de ce que les puissants de ce monde s’autorisent et s’interdisent pour garantir leurs intérêts et leurs privilèges. Il nous suffit de continuer à mentir sur Allah et de déclarer qu’Il est le Garant et le Défenseur de nos pays et de nous gouvernants comme si Allah pouvait accepter l’incompétence, la trahison et la corruption du seul fait que nous vivons dans des « terres musulmanes » ou que nous portons des prénoms musulmans. La plus grande faillite des Arabes et des Musulmans est dans la croyance de ce genre de mythe que les rentiers de la religion et du pouvoir ont cultivé dans nos esprits infantiles. Alea jacta est, les Syriens dans quelques années viendront, à leur tour, demander aux Arabes et aux Turques dommages et intérêts, les Libyens aux Français…
{Nous avons destiné beaucoup de djinns et d’hommes pour l’Enfer. Ils ont des cœurs, mais ne comprennent pas. Ils ont des yeux, mais ne voient pas. Ils ont des oreilles, mais n’entendent pas. Ceux-là sont comme les bestiaux, même plus égarés encore. Tels sont les insouciants.} Le Coran [7:179]